KHAKIMOV : LES SOLDATS PERDUS DE L’ARMÉE ROUGE
Un film de David Muntaner
« Une guerre ne se termine que le jour où le dernier soldat est rentré au pays ». Ces mots sont ceux du Colonel Jeltakov, un ex parachutiste, vétéran de la guerre en Afghanistan. Marqué à jamais par ce conflit qui a scellé le destin de l’Union Soviétique, il garde toujours sur lui une liste de noms… 284 noms. Ceux des soldats soviétiques disparus sans laisser de traces, là-bas en Afghanistan. Ces hommes ont disparu en mission. Certains ont déserté, d’autres ont été capturés par les moudjahidines ou ont été tués sans qu’on retrouve leur corps. La Russie leur a donné un nom : les soldats perdus de l’armée rouge.
Plus de 30 ans après la fin de cette guerre, le colonel Jeltakov lui, continue à les rechercher. Ce jour-là, il prépare un nouveau voyage en Afghanistan. Depuis quinze ans qu’il dirige les missions de recherche, il a parcouru des vallées, fouillé des villages, interrogé des témoins et ramené au pays des dizaines de soldats qui s’étaient évaporés il y a 30 ou 40 ans. Sa prochaine mission vient d’être annulée. Le retour des talibans au pouvoir ne lui permettra pas de faire ce voyage, mais il attendra. Le temps qu’il faudra…
Alexei Olenin est un de ces soldats disparus. En 1982 il tombe dans une embuscade et va passer toute la guerre prisonnier des moudjahidines, se demandant à quel moment il sera exécuté. Lorsque l’armée rouge est défaite en 1989, les afghans lui proposent de le gracier. Il devra se convertir à l’Islam et épouser une afghane du village. Alexei Olenin accepte et devient Rakhmatula.
L’Afghanistan, il devait y passer deux ans, il y restera vingt-cinq années. Jusqu’à ce que le colonel Jeltakov le retrouve. Alexei se laisse convaincre de rentrer au pays. On lui promet un emploi, un appartement, une vie meilleure pour ses enfants et sa femme. Aujourd’hui, la réalité est bien moins réjouissante. A Togliati, dans le sud de la Russie, il tourne des heures au volant de son taxi fatigué pour gagner quelques roubles. Alexei a quitté la grande Union Soviétique a 18 ans, il retrouve la Russie de Poutine. Tout a changé et lui ne parvient pas à s’y retrouver… Ses pensées souvent le ramènent en Afghanistan, le pays où il s’est marié, où ses enfants sont nés.
Chahabuddin est un autre de ces soldats soviétiques. Lui aussi a été kidnappé par l’ennemi pendant la guerre. Aujourd’hui, il est marié, père de huit enfants et vit à Hérat, dans le nord de l’Afghanistan. Rentrer en Russie n’est plus une option pour lui. Il se sent afghan. Un afghan presque comme les autres. Et puis il y a la culpabilité : les hommes qu’il a tué, cette guerre de l’Union soviétique, tout cela lui fait honte… L’Afghanistan, ce pays, qu’il était venu combattre il l’a finalement adopté pour toujours…
Une co-production Memento et Arte
2021